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Le Seuil
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Articuler pour notre temps une philosophie qui, quant à la pensé de l'être, ouvre une autre voie que celle de Heidegger (soit celle de mathème plutôt que celle du poème) et, quant à la doctrine du sujet, se tienne au-delà de Lacan : tel est l'enjeu.
Pour ce qui est de l'être, la thèse radicale est que, depuis son origine grecque, c'est la mathématique et elle seule qui en déploie le processus de pensée ; et que, de la mathématique aujourd'hui, le référent est la théorie cantorienne des ensembles. D'où se déduit une ontologie du pur multiple.
Reste qu'existe un site de « ce qui n'est pas l'être » : c'est celui de l'événement, terme surnuméraire pour un franchissement indécidable au savoir et dont la vérité est toujours par avance indiscernable.
Le sujet, dès lors, loin d'être le garant ou le support de la vérité, en est bien plutôt une instance locale, improbable, qui tire du devenir aléatoire d'une vérité dans l'événement son peu d'être. Il n'en tisse pas moins une fidélité qui s'inscrit dans l'art, la science, la politique et l'amour.
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Jacques Lacan, passé présent ; dialogue
Alain Badiou, Elisabeth Roudinesco
- Le Seuil
- 15 Mars 2012
- 9782021078046
La célébration du trentième anniversaire de la mort de Lacan a été l'occasion d'une formidable réception médiatique, de polémiques violentes et de débats. Parmi ces derniers, l'un des plus pertinents aura porté sur l'actualité et l'avenir du geste lacanien. Le philosophe et l'historienne ont entrepris d'en prolonger l'effervescence à travers un dialogue vivant et très élaboré, fondé sur la reconnaissance réciproque de leurs différences, la qualité de leurs points de vue et leur amitié.Le livre comporte deux parties. La première développe une suite de réflexions personnelles sur la relation que chacun des deux auteurs a entretenu avec Lacan, ainsi qu'une évocation des positions politiques et philosophiques de Lacan et de son importance dans le champ intellectuel. C'est la partie "homme Lacan", tel qu'il était et tel que les deux auteurs le comprennent.La deuxième est plus axée sur l'oeuvre elle-même et sur certains aspects de celle-ci : la logique, les mathèmes, les noeuds, les néologismes, la relation à l'amour, à la féminité, à la structure.
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Conditions rassemble des textes d'Alain Badiou tous postérieurs à son livre fondamental, L'Être et l'Événement, paru au Seuil 1988.Bien que l'origine de ces écrits soit souvent de circonstance (colloques, articles, interventions...), leur ordre est parfaitement lisible.On part de la philosophie « elle-même » et d'une critique explicite du thème de sa « fin ». On en propose une définition, à la fois nouvelle et soumise à l'épreuve de son origine (Platon) aussi bien que de son état contemporain.Viennent ensuite des études ordonnées selon les quatre grandes conditions de la philosophie (d'où le titre général) : philosophie et poésie, philosophie et mathématiques, philosophie et politique, philosophie et amour.Ce recueil ne suppose nullement la connaissance de L'Être et l'Événement. Peut-être même peut-il lui servir d'introduction, par l'effet de clarté concrète qui est le sien. Entre les deux livres, la préface de François Wahl donne tous les passages nécessaires.Alain BadiouEst né en 1937 à Rabat (Maroc). Il enseigne la philosophie à Vincennes-Saint-Denis depuis 1969.Romancier, dramaturge, son système philosophique est récapitulé dans L'Être et l'Événement (Seuil, 1988).
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Notre temps est sans aucun doute celui de la disparition sans retour des dieux.
Mais cette disparition relève de trois processus distincts, puisqu'il y a eu trois dieux capitaux : celui des religions, celui de la métaphysique et celui des poètes.
Du dieu des religions, il faut seulement déclarer la mort. le problème, qui est en dernière instance politique, est de parer aux effets désastreux qu'entraîne toute subjectivation obscure de cette mort.
Du dieu de la métaphysique, il faut achever le parcours par une pensée de l'infini qui en dissémine la ressource sur l'étendue entière des multiplicités quelconques.
Du dieu de la poésie, il faut que le poème désencombre la langue, en y césurant le dispositif de la perte et du retour.
Engagés dans la triple destitution des dieux, nous pouvons déjà dire, nous, habitants du séjour infini de la terre, que tout est ici, toujours ici, et que la ressource de la pensée est dans la platitude égalitaire fermement avertie, fermement déclarée, de ce qui nous advient, ici.
A. b.
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Le propos fondamental du livre d'Alain Badiou est d'établir que le noyau de toute philosophie compatible avec le marxisme est une théorie du sujet. Mais laquelle ? Ni le sujet comme conscience (thèse de Sartre), ni l'hypothèse du sujet " naturel ", désirant ou substantiel, ne peuvent convenir. C'est du côté du sujet clivé tel que Lacan - notre Hegel - en fait théorie, qu'il faut chercher une issue. Alain Badiou trouve là de quoi refondre, non pas le thème, forclos, d'un sujet de l'Histoire, mais celui des sujets politiques. L'opération ne se peut faire sans étendre le concept lacanien du sujet, lié dès l'abord à deux types d'effets: l'occupation d'une place vide d'un côté, l'excès sur cette place vide de l'autre. Instrument de cette distinction : le couple algèbre/topologie. Il en résulte que le réel, pensable - comme le fait Lacan - sous le concept algébrique de l'objet cause, doit également être reçu sous celui, topologique, de consistance: ontologie en partie double. Le coeur de la question est atteint quand entre en dialectique avec la notion lacanienne du manque, la catégorie nouvelle de destruction. Qu'on ne s'attende pas à ne trouver ici qu'une discussion de théories. Mallarmé y voisine abondamment avec Mao Tsé-toung, Hilderlin avec Hegel, et le théorème de Gödel avec la situation des ouvriers immigrés.
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Le XXe siècle a eu lieu. Mais qu'est-ce qu'un siècle ? Et qu'en est-il en particulier de celui-ci ?
Quand a-t-il vraiment commencé et s'est-il vraiment fini ? Comment méditer philosophiquement tout cela ? Choisir un type d'unité objective, ou historique (l'épopée communiste, ou le mal radical, ou la démocratie triomphante...) ne peut servir immédiatement. Car, philosophiquement parlant, la question est moins ce qui s'est passé dans le siècle, que ce qui s'y est pensé. Qu'est-ce qui a été pensé par les hommes de ce siècle, qui ne soit pas le simple développement d'une pensée antérieure ?
La méthode que choisit ici Alain Badiou est la suivante : prélever dans la production du siècle quelques documents, quelques traces (poèmes, fragments philosophiques, pièces de théâtre) qui indiquent comment le siècle s'est pensé lui-même. Or, lorsqu'o n procède ainsi, l'image qui se dégage du XXe siècle est au rebours de tous les jugements prononcés, car on sait que le XXe siècle a été jugé, et même condamné depuis longtemps, comme le siècle de la terreur totalitaire, des idéologies utopiques et criminelles, des illusions vides, des génocides, des fausses avant-gardes, de l'abstraction partout substituée au réalisme démocratique, etc. Mais, si le véritable procès du siècle reste encore à instruire, c'est parce que la passion dominante du XXe siècle n'a nullement été celle de l'imaginaire ou des idéologies. Encore moins une passion messianique. La terrible passion du XXe siècle a été, contre le prophétisme du XIXe, la passion du réel. Il s'agissait d'activer le Vrai, ici et maintenant.
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Ce livre, auquel Alain Badiou travaille depuis une quinzaine d'années, est une suite de l'Etre et
l'Evenement, son précédent « grand » livre de philosophie, paru aux éditions du Seuil en 1988.
Mais que veut dire « suite » oe
Si on abandonne tout espoir de finaliser le vrai, ou de l'incorporer à l'être comme devenir, si l'être
n'est que multiplicité indifférente, alors le statut de ce qui apparaît « en vérité », le surgissement
corporel (ou objectif) d'une vérité dans tel ou tel monde, relève d'une investigation séparée. Et, au
coeur de cette investigation, on trouve la question de la consistance des mondes - ou évidence de
l'être-là ..., question dont ni l'ontologie des multiplicités ni l'examen de la forme générique des
vérités ne fournissent la réponse.
Ce n'est qu'en examinant les conditions générales de l'inscription d'une multiplicité dans un monde,
et par conséquent en exposant au pensable la catégorie même de « monde », que nous pouvons
espérer savoir enfin, d'abord, ce qu'est l'effectivité de l'apparaître, ensuite, comment appréhender
la singularité des exceptions phénoménales que sont, dans leur surgir et leur déploiement, les
vérités. Vérités auxquelles est suspendue, comme le montre cette « grande logique », la possibilité
de vivre d'une vie qui ne soit pas indigne.
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Manifeste pour la philosophie
Alain Badiou
- Le Seuil
- L'ordre Philosophique
- 1 Février 1989
- 9782020105590
La philosophie est aujourd'hui possible, dans la plénitude de son ambition. La philosophie elle-même, telle que l'entendait Platon.
Ce qui a entraîné son éclipse au XIXe siècle, c'est qu'elle s'est identifiée, « suturée », tour à tour à un seul des champs où se pose, par-delà le savoir, une vérité : le scientifique (positivisme), le politique (marxisme), puis, avec Nietzche et plus encore Heidegger, le poème.
Or les mathématiques, la poésie, la politique comme invention, et l'amour comme pensée sont bien quatre requises, la philosophie étant cette pensée unique qui leur donne accueil et abri.
Le programme est donc celui d'une restitution de la pensée philosophique à l'espace complet des vérités qui la conditionnent. D'où les questions centrales que toute la philosophie se pose aujourd'hui : le Sujet, dès lors qu'on ne peut maintenir la catégorie de l'objet, ruiné avec l'objectivisme ; le Deux, dès lors qu'on ne peut se satisfaire du schéma dialectique ; enfin la fonction de l'indiscernable, point où se donne à réexaminer le rapport entre langage et pensée.
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Didactisme, romantisme, classicisme sont les schèmes possibles du noeud entre art et philosophie, le tiers terme de ce noeud étant l'éducation des sujets, et singulièrement de la jeunesse.
Or, ce qui caractérise à mon sens notre siècle finissant est que, tout en ayant éprouvé la saturation de ces trois schèmes, il n'en a pas introduit de nouveau. ce qui tend à produire, aujourd'hui, une sorte de dénouage des termes, un dé-rapport désespéré entre l'art et la philosophie, et la chute pure et simple de ce qui circulait entre eux: le thème éducatif de là découle la thèse autour de laquelle ce petit livre n'est qu'une série de variations: au regard d'une telle situation de saturation et de clôture, il faut tenter de proposer un nouveau schème, un quatrième mode de nouage entre philosophie et art.
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Une exigence fondamentale de la pensée contemporaine est d'en finir avec la " philosophie politique ".
Qu'est-ce que la philosophie politique? son opération centrale est de ramener la politique à l'exercice du " libre jugement " et de la " discussion ", dans un espace public oú ne comptent en définitive que les opinions.
On sait que, bien avant d'être arendtien, ou kantien, le thème de l'opposition irréductible de la vérité et de l'opinion est platonicien. ce qui, en revanche, n'est pas platonicien est l'idée que la politique serait ainsi éternellement vouée à l'opinion, éternellement disjointe de toute vérité.
Sauf pour qui pense que le commentaire de bistrot, ou la conversation entre amis, constitue " l'essence même de la vie politique ", il est en effet clair que le conflit des opinions n'est politique qu'autant qu'il se cristallise dans une décision. la question d'une possible vérité politique doit alors être examinée non du seul point de la " discussion ", mais dans le processus complexe qui noue la discussion à la décision.
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1985 Penser la politique, c'est d'abord réfuter le politique : le dénoncer comme illusion (imaginaire) du « faire un », des identifications (le parti, le syndicat, la société sans classe), du fait cernable, de la prévision assurée. La politique naît, elle, de l'événement, par où l'on entend ici le surgissement des dominés rompant l'ordre du politique et l'unité de celui-ci : un surgissement toujours précaire, dont la mise en oeuvre suppose un pari et un calcul chaque fois risqués : en bref, il y a la politique quand - et seulement si - une dé-liaison de la réalité propose un point de réel.
Alain Badiou part de la décomposition du marxisme où il voit l'effet de ce que Marx, tout en montrant l'irruption du réel dans la réalité du politique, a continué de penser dans le politique. Et il avance un essai de recomposition centré sur l'interprétation de ce qui fait événement, dès lors que les dominés ont prononcé, au défaut de l'ordre, leur existence, et qu'il est possible de parier sur cette prononciation.
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Controverse ; dialogue sur la politique et la philosophie de notre temps ; animé par Philippe Petit
Alain Badiou, Jean-Claude Milner
- Le Seuil
- 11 Octobre 2012
- 9782021086386
Ils sont issus de la même génération. Ils ont tous les deux traversés les années rouges à la fin des années 1960. Alain Badiou est né en 1937 à Rabat, Jean-Claude Milner en 1941 à Paris. Mais s'ils furent l'un et l'autre maoïstes, le premier fixait toute son attention vers la Chine quand l'autre s'en détournait déjà. Cette polémique originaire sur le destin du gauchisme s'est nourrie de nouvelles et profondes divergences à propos du rôle de la philosophie et de la politique au fil des années. La controverse oppose deux grands penseurs que tout rapproche et que tout éloigne. Qu'ils évoquent l'ère des révolutions, et en particulier la Commune et la Révolution culturelle chinoise ; qu'ils se penchent sur les grands massacres de l'Histoire ; qu'ils discutent de l'infini, de l'universel, du nom Juif, de l'antisémitisme, de la violence, du rôle des intellectuels, du progrès, du capitalisme, de la gauche, de l'Europe. Le scepticisme bon teint de Jean-Claude Milner se heurte constamment à la passion doctrinale d'Alain Badiou. L'amoureux de Lucrèce se frotte à la cuirasse de l'héritier de Platon. Les arguments minimalistes de Jean-Claude Milner croisent les propositions maximalistes d'Alain Badiou. Et ce débat hors normes débouche finalement sur de nouvelles interrogations.
Car il n'est de meilleur remède à la puissance écrasante de la raison médiatique que la reviviscence des grandes disputes de l'esprit.
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Frege, Dedekind, Peano, Cantor : penser le nombre a requis à la fin du siècle dernier un effort qui a échoué, faute d'une élucidation suffisante de ce qu'est le multiple. Laquelle implique que le Nombre est une forme spécifiable avant tout jeu d'opérations ; que le Un est en crise ; et qu'en revanche une série de décisions axiomatiques suivent la promotion du vide et de l'infini.
Le "fond" naturel du Nombre, c'est alors ce multiple à la fois sériel et homogène qu'on appelle "ordinal". L'opérateur crucial est ici le concept, à la fois soustrait à toute intuition et philosophiquement clair, d'ensemble transitif.
S'en suit la définition du Nombre : donnée conjointe d'un ordinal (la matière du Nombre) et d'une partie de cet ordinal (sa forme). Définition qui couvre un champ immense, dont tous nos nombres classiques constituent une infime partie, à côté d'une foule in-nombrable d'autres espèces à ce jour inexplorées.
De la simple essence des nombres se réduit enfin qu'ils sont réglés par les structures usuelles, qu'elles soient d'ordre, de "coupure" (singularisation ponctuelle dans un environnement dense) ou d'opérations.
Trop longtemps masqué par la manipulation opératoire des espèces disparates du Nombre sous le signe technique de leur simple disponibilité dans le registre de l'étant, c'est l'accès à la pensée du Nombre comme être qui se trouve ainsi ouvert.
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Ni roman, ni essai, mais oeuvre littéraire (l'éclat de la langue, la richesse des notations visuelles et sonores, l'invention sans fin et l'élan du discours n'appartient qu'au poète) et expérience de pensée (au croisement des courants marxiste, existentialiste, structuraliste) Almagestes est la premier volet, consacré au langage, d'un tryptique dont les deux autres parties seront consacrées à l'homme et à l'histoire.Ce sont donc les diverses figures du langage qu'explore Almagestes. Le mythe du langage, d'abord : les hommes entassent en esclaves les mots comme faisaient les briques les constructeurs de Babel; et la seule liberté, le seul prométhéïsme qui puisse ici s'entrevoir, est de ruse : le mot tourné par le mensonge. Le dialogue de deux étudiants en Lettres et en Philosophie illustre ensuite ce réseau autonome du langage où toute parole est prise : Bérard et Fréville veulent parler mais leur tentative est à chaque instant emportée par le double jeu de leurs associations de mots réelles ou possibles, ce que Badiou désigne comme le "monologue extérieur". Une seconde figure du langage est la fascination qu'il tente d'exercer sous forme de poème. A cette figure, Almagestes lie toujours le personnage féminin. C'est pour ce personnage qu'une nuit, dans un bar, la parole s'élève comme un chant arraché au silence. Et c'est dans le journal de Chantal que la parole peu à peu se défait au profit des choses mêmes.Une troisième figure, plus secrète - dira-t-on plus maligne ? - est cet ordre des probabilités, ce jeu des permutations à quoi une parole (et une conduite) qui se croient libres, sont en réalité soumises. Ansi, les parieurs qui se penchent sur la ville où errent Fréville et Chantal, peuvent tenter de prévoir le chemin du couple. Et quand Bérard, Fréville, Chantal se regroupent autour de Dastaing, le romantique de l'action, leurs rhétoriques personnelles, leurs mouvements réciproques, leurs projets d'action politique laissent peu à peu paraître une de ces combinaisons de rôles que la psychanalyse nous a appris à déchiffrer.Parvenue à ce point, l'exploration d'Alain Badiou peut se replier doublement sur elle-même. C'est d'un côté la méditation de Fréville sur les rapports entre liberté et langage, d'où sort tout le livre et où Babel est comme intériorisée. Et c'est de l'autre côté l'éclatement de la méditation dans l'action - une manifestation, en l'occurence : le langage explose sous la pression de l'Histoire. Almagestes appelle déjà Portulans.
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Almagestes se rapportait essentiellement au Langage. Portulans concerne la Subjectivité - mieux vaudrait dire les figurations romanesques de cette construction idéologique particulière que depuis deux ou trois siècles on appelle : sujet, personne, individu, conscience, et au dépérissement de laquelle nous avons le bonheur ambigu d'assister.Ce qu'Almagestes tentait au niveau des structures élémentaires de l'expression romanesque (styles, codes, syntaxes...), Portulans l'entreprend donc, d'une manière infiniment plus classique, au niveau des "grandes formes" : description, narration, chronologie, personnages, scènes, etc. C'est dire qu'à la différence d'Almagestes, Portulans est un roman.Cependant ce roman demeure critique, puisque aussi bien le point de vue de la subjectivité n'est pas, pour l'auteur, celui de la vérité. De là que Portulans enveloppe la possibilité d'une double lecture. On peut y voir un roman traditionnel, où sept personnages, peut-être huit, et peut-être neuf, tissent et défont, dans des aventures ordonnés, le réseau mobile de leurs rapports. Mais on peut considérer que ces personnages composent les diverses figures structurées d'une seule subjectivité, progressivement inscrite dans le mécanisme fatal qui les gouverne tous sans qu'ils le sachent, si même ils le pressentent : ainsi se trouve montré que le Sujet trouve son être inévitable dans un Jeu où ce qui s'atteste n'est que son manque.La lecture de Portulans se trouve être, de ce fait, inverse de celle d'Almagestes. Le premier livre dispersait des thèmes simples dans une prolifération culturelle délibérement hétérogène et retorse. L'idée de Portulans, c'est-à-dire la structure souterraine qui en est le sujet véritable, n'est guère simple. Mais son évidence extérieure est celle d'un roman "d'autrefois", qu'il n'est pas interdit de lire pour le calme intérêt des histoires qu'il raconte, des personnages qu'il invente et des lieux qu'il décrit.