Paru en 1762, le Contrat social, en affirmant le principe de souveraineté du peuple, a constitué un tournant décisif pour la modernité et s'est imposé comme un des textes majeurs de la philosophie politique.
Il a aussi acquis le statut de monument, plus célèbre que connu, plus révéré - ou honni - qu'interrogé. Retrouver, dans les formules fameuses et les pages d'anthologie, le mouvement de la réflexion et les questions vives qui nourrissent une oeuvre beaucoup plus problématique qu'affirmative, c'est découvrir une pensée qui se tient au plus près des préoccupations d'aujourd'hui : comment intégrer les intérêts de tous dans la détermination de l'intérêt commun ? Comment lutter contre la pente de tout gouvernement à déposséder les citoyens de la souveraineté ? Comment former en chacun ce sentiment d'obligation sans lequel le lien social se défait ?
«On sent en soi-même un plaisir secret lorsqu'on parle de cet empereur ; on ne peut lire sa vie sans une espèce d'attendrissement ; tel est l'effet qu'elle produit qu'on a meilleure opinion de soi-même, parce qu'on a meilleure opinion des hommes.» Montesquieu
Paru en 1755, le Discorns sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes peut être considéré comme la matrice de l'oeuvre morale et politique de Rousseau : il y affirme sa stature de philosophe, l'originalité de sa voix, la force de son "système".
Résoudre le problème posé par l'Académie de Dijon, "quelle est la source de l'inégalité parmi les hommes et si elle est autorisée par la loi naturelle ?" en d'autres termes expliquer que riches et puissants dominent leurs semblables sur lesquels ils n'ont pas de réelle supériorité, exige aux yeux de Rousseau de poser à nouveaux frais la question "qu'est-ce que l'homme ?". Pour cela, il faut comprendre comment s'est formée sa "nature actuelle", si éloignée de ce que serait son état de nature : "Si je me suis étendu si longtemps sur la supposition de cette condition primitive, c'est qu'ayant d'anciennes erreurs et des préjugés invétérés à détruire, j'ai cru devoir creuser jusqu'à la racine."
Essais.Livre I Qu'un tel homme ait écrit, vraiment le plaisir de vivre sur cette terre en a été augmenté... C'est à son côté que j'irais me ranger, s'il fallait réaliser la tâche de s'acclimater sur cette terre.
Nietzsche
"Dire qu'il est trop tôt ou trop tard pour faire de la philosophie, cela revient à dire que l'heure d'être heureux n'est pas venue encore ou qu'elle a déjà passé." Le bonheur est la fin de l'existence humaine. Qui le niera ? Mais il est plus difficile de tirer au clair les moyens d'y parvenir.Il faut lire ce texte inoubliable pour découvrir que la pensée et l'amitié sont les seuls vrais havres du sage. Pour être heureux, renouons ave Épicure.Le dossier - L'architecture de l'oeuvre - L'auteur et le contexte - Thèmes et problématiques de l'oeuvre - Glossaire
Essais Livre 2 "Le Montaigne de L'Apologie est un peu comme un Pascal à qui brusquement, par je ne sais quel moyen, la fausseté historique du christianisme aurait été démontrée.
Dès lors que reste-t-il de tout ce qu'il a écrit et pensé ? Exactement ce qui en reste pour un non-chrétien, il reste qu'il a pensé, écrit en toute sincérité." Michel Butor
Après la première partie dans laquelle le voyageur Raphaël Hythlodée dresse le portrait d'un monde imaginaire où règnent la tolérance et la liberté, la seconde partie décrit plus précisément l'île d'Utopie dont le système politique, économique et social est mis en opposition avec l'Angleterre d'Henri VIII.
Ce qui ne devrait jamais se produire arrive parfois pourtant. Lorsque la vie bascule, et que l'injustice du sort sidère, c'est tout notre univers de sens qui chavire. Nous avons beau savoir que l'innocence ne protège pas et que le mal frappe à l'aveugle, le vertige nous gagne. Comment vivre dans un monde où des choses affreuses arrivent à des gens bien ?La philosophie et la théologie ont proposé des solutions pour relever le défi. Mais elles peinent à soulager le sentiment de scandale, quand elles ne le renforcent pas encore en prétendant passer outre. Sans Providence à qui adresser sa plainte, auprès de quelle instance faire appel ?Cette cour d'appel existe. C'est la littérature. Elle n'a certes pas le pouvoir d'effacer les dommages. Mais elle offre au moins la reconnaissance sans laquelle le désarroi ronge, en affrontant le scandale du mal sans chercher à le nier. Depuis l'immémoriale histoire de Job, l'homme heureux et juste à qui tout a été retiré pour voir ce que cela lui ferait, les expériences sur l'injustice du sort ne constituent-elles pas l'un des motifs préférés de la fiction ?Du Roi Lear de Shakespeare à Némesis de Philippe Roth, en passant par Dostoïevski, Charlotte Brontë, Kafka ou Camus, les grandes fictions explorent la signification que la rencontre du mal peut avoir dans nos vies. En nous libérant des mauvaises interprétations des «épreuves», celles qui culpabilisent, emprisonnent dans la sidération et empêchent d'avancer, elles nous ouvrent un chemin en littérature pour surmonter la perte de sens. Et guérir.
Ce recueil comprend des textes politiques du début (1783-1786) et de la fin (1795-1798) de la philosophie critique de Kant. Aux textes célèbres, nouvellement traduits, nous joignons des textes inédits en français (sur le droit naturel, sur l'illégitimité de la contrefaçon des livres, sur la fabrication des livres...).
«Comment devenir vertueux?» Cette question, posée à Socrate par Ménon, jeune noble thessalien en visite à Athènes, se révèle ambiguë. Car la vertu, est-ce l'excellence du citoyen et le talent de l'homme politique? Ou bien est-ce la vertu telle que l'entend Socrate, subordonnée au bien et soumise au plus strict exercice de la justice? Mais les essais infructueux d'une définition de la vertu cèdent bientôt la place à une question plus générale:«Comment est-il possible de chercher et d'apprendre?» Les réponses que Platon nous donne dans le Ménon seront reprises deux mille ans plus tard par Descartes et par Leibniz:«La vérité de ce que nous devrons jamais découvrir et connaître nous appartient depuis toujours.» C'est dans ce dialogue que, pour la première fois, l'idée d'une connaissance prénatale qui appartienne à l'âme indépendamment de tout apprentissage est exposée de façon systématique et argumentée. Dernière défense de Socrate que Platon ait écrite, le Ménon fait voir clairement ce qu'est le travail de la pensée, l'approche d'une vérité dont la présence est connue avec conviction, mais dont la forme est encore ignorée.
Le texte fondateur de la philosophie occidentale sur la science de l'être en tant qu'être.
« La loi morale est sainte (inviolable). L'homme est sans doute très éloigné de la sainteté, mais il faut que l'humanité dans sa personne soit sainte pour lui. Dans la création tout entière, tout ce que l'on veut, et ce sur quoi on a quelque pouvoir, peut aussi être employé simplement comme moyen ; l'homme seul, et avec lui toute créature raisonnable, est fin en soi-même. Il est, en effet, grâce à l'autonomie de sa liberté, le sujet de la loi morale, laquelle est sainte. C'est précisément en raison de cette liberté que toute volonté, même la volonté propre à chaque personne et dirigée sur elle-même, est bornée par la condition de l'accord avec l'autonomie de l'être raisonnable, à savoir de ne le soumettre à aucune intention qui ne serait pas possible suivant une loi pouvant trouver sa source dans le sujet même qui pâtit, et donc de ne l'utiliser jamais simplement comme moyen, mais en même temps en lui-même comme une fin. Cette condition, à bon droit, s'impose, pour nous, même à la volonté divine relativement aux êtres raisonnables dans le monde, en tant qu'il s'agit de ses créatures, parce qu'elle repose sur la personnalité de ceux-ci, par laquelle seule ils sont des fins en soi.» Kant
Livre de la maturité, Humain, trop humain ouvre la deuxième période de la pensée nietzschéenne. Le philosophe a trouvé le style d'écriture qu'il n'abandonnera plus - la forme aphoristique - et l'objet qui l'occupera toujours - l'analyse des moeurs et de la culture.Dans ce second volume, composé d'Opinions et sentences mêlées et du Voyageur et son ombre, Nietzsche aborde des sujets de tous ordres : l'enseignement, la mode, le christianisme, le châtiment, les Grecs... Au lieu de proposer un exposé dogmatique, il procède, tel le voyageur sans attaches, par essais et expérimentations. Mais derrière le caractère apparemment hétéroclite de l'oeuvre, c'est bien à une étude des moeurs et, à travers elle, à une critique de la morale que Nietzsche s'emploie. Pour lui, en effet, la morale telle qu'elle s'est développée dans la tradition philosophique a masqué derrière les lumières de la raison ce qui est perçu comme une faiblesse : les pulsions, l'irrationnel, l'«ombre» en chacun de nous - ces choses injustement mises au rebut alors qu'elles constituent la réalité profonde de la vie et que Nietzsche appelle le «trop humain» de l'humain.
Les mots « terre d'Israël » renferment une part de mystère. Par quelle alchimie la Terre sainte de la Bible a-t-elle pu devenir le territoire d'une patrie moderne, dotée d'institutions politiques, de citoyens, de frontières et d'une armée pour les défendre ?
Historien engagé et volontiers polémiste, Shlomo Sand a, à grand bruit, dénoncé le mythe de l'existence éternelle du peuple juif. Il poursuit ici son oeuvre de déconstruction des légendes qui étouffent l'État d'Israël et s'intéresse au territoire mystérieux et sacré que celui-ci prétend occuper : la « terre promise », sur laquelle le « peuple élu » aurait un droit de propriété inaliénable.
Quel lien existe-t-il, depuis les origines du judaïsme, entre les juifs et la « terre d'Israël » ? Le concept de patrie se trouve-t-il déjà dans la Bible et le Talmud ? Les adeptes de la religion de Moïse ont-ils toujours aspiré à émigrer au Moyen-Orient ? Comment expliquer que leurs descendants, en majorité, ne souhaitent pas y vivre aujourd'hui ? Et qu'en est-il des habitants non juifs de cette terre : ont-ils - ou non - le droit d'y vivre ?
Qu'est-ce que la nostalgie sinon une mélancolie humaine rendue possible par la conscience de quelque chose d'autre, d'un ailleurs, d'un contraste entre passé et présent ? Et cette nostalgie n'est-elle pas aussi provoquée essentiellement par l'irréversibilité du temps ? Car on ne saurait remonter le cours du temps, tel est l'obstacle insurmontable qu'il oppose à nos entreprises.
C'est notre impuissance devant cette impossibilité qui fait toute l'amertume de la nostalgie et l'absurdité des chimères du rajeunissement. La nostalgie n'est pas le mal du retour : on peut toujours revenir à son point de départ, à son lieu natal (l'espace se prête docilement à toutes nos allées et venues) mais il est impossible de redevenir celui qu'on était au moment du départ. Mais si le temps s'oppose irréductiblement à la rétrogradation il ouvre devant nous une carrière infinie à la liberté. L'homme peut s'ouvrir à l'idée du futur et confirmer ce que le temps affirme. Se servant d'exemples tirés de la vie quotidienne aussi bien que d'oeuvres poétiques, philosophiques ou musicales, Vladimir Jankélévitch démontre en fin de compte que l'irréversible n'admet qu'un seul remède : le consentement joyeux de l'homme à l'avenir, au futur.
Dialogues « C'est très difficile de "s'expliquer" - une interview, un dialogue, un entretien. La plupart du temps, quand on me pose une question, même qui me touche, je m'aperçois que je n'ai strictement rien à dire. Les questions se fabriquent, comme autre chose. Si on ne vous laisse pas fabriquer vos questions, avec des éléments venus de partout, de n'importe où, si on vous les "pose", vous n'avez pas grand-chose à dire. (...) Les questions sont généralement tendues vers un avenir (ou un passé). L'avenir des femmes, l'avenir de la révolution, l'avenir de la philosophie, etc. Mais pendant ce temps-là, pendant qu'on tourne en rond dans ces questions, il y a des devenirs qui opèrent en silence, qui sont presque imperceptibles. On pense trop en termes d'histoire, personnelle ou universelle. Les devenirs, c'est de la géographie, ce sont des orientations, des directions, des entrées et des sorties. »
quels sont les rapports qui doivent exister entre l'état et l'église, ou plutôt entre l'état et les églises ? pour répondre à cette question, la lettre sur la tolérance emprunte la voie d'une double réflexion sur la nature de la croyance et du pouvoir.
la croyance ne dépend pas de la volonté, tandis que le pouvoir, qui est essentiellement coercitif, ne peut influer sur la conduite des hommes que dans les actions où ces derniers ont la possibilité de modifier leur conduite par une décision volontaire ; or, puisque la croyance n'entre pas dans cette catégorie, elle ne fait pas partie des objets possibles de l'autorité politique. au coeur du raisonnement qui conduit à l'idée de tolérance figure donc une thèse fort simple : nos pensées ne sont pas en notre pouvoir.
jointe à la conviction que, en matière religieuse, seule la sincérité sauve, elle constitue le fondement de la conception lockienne de la tolérance.
En 1943, alors qu'elle a rejoint, à Londres, le commissariat à l'Intérieur de la France combattante, Simone Weil écrit ce qui sera sa dernière oeuvre. Sa mort prématurée quelques mois plus tard met fin brutalement à la rédaction de ce texte majeur par lequel elle entendait apporter sa contribution à la France d'après-guerre.
Prélude à la nouvelle Déclaration des droits de l'homme souhaitée par le général de Gaulle, essai sur les causes du déracinement du peuple français et sur les conditions de sa renaissance, méditation sur la force et sur l'obéissance, L'Enracinement est aussi le testament spirituel de Simone Weil. Selon Albert Camus, qui l'édita pour la première fois en 1949, ce livre « d'une audace parfois terrible, impitoyable et en même temps admirablement mesuré, d'un christianisme authentique et très pur, est une leçon souvent amère, mais d'une rare élévation de pensée ».
Comment les sociétés se forment-elles ? Pourquoi s´affrontent-elles ? Ces conflits peuvent-ils être évités ? Morale et religion visent-elles seulement à rendre possible la vie en société, ou permettent-elles à l´espèce humaine de dépasser sa condition naturelle et de trouver une issue à la violence ? Telles sont quelques-unes des questions au coeur des Deux Sources de la morale et de la religion (1932), la somme de philosophie morale et politique de Bergson, qui fut aussi son dernier grand livre.
Dans ce texte hanté par le spectre de la guerre et par le développement de la technique, mais aussi guidé par une méditation sur le mysticisme chrétien, Bergson articule l´étude de la société à sa philosophie de la vie.
Mettant sa doctrine à l´épreuve, il s´efforce de formuler des principes d´action pour des hommes devenus conscients de la nécessité d´affronter leur destin commun. Et tandis que « l´humanité gémit, à demi écrasée sous le poids des progrès qu´elle a faits », il nous rappelle que son avenir dépend d´elle.
Illustration de couverture : Virginie Berthemet © Flammarion
La Rhétorique est un texte fondateur à bien des égards. Outre l'intérêt capital qu'elle présente pour les spécialistes de la civilisation grecque antique, elle constitue une mine d'informations et de questionnements pour les théoriciens du langage, pour les historiens ou les praticiens de ce qu'on nomme aujourd'hui « communication ». Mais son intérêt est surtout philosophique. Reconnaître l'importance de la persuasion dans les rapports sociaux et politiques, comme alternative à la violence et pour satisfaire ce que l'homme a d'humain ; reconnaître dans la persuasion la présence incontournable de l'opinion (doxa), analyser ses mécanismes, y introduire de la rationalité sans ignorer ni ses pouvoirs ni ses prestiges, telle est l'entreprise de savoir, de lucidité et de progrès à laquelle nous convie Aristote. Qui nierait sa brûlante actualité ?
Dès sa parution en 1793, La Religion comprise dans les limites de la seule raison se heurte à la censure : Kant y critique les religions établies, auxquelles il reproche de verser dans la superstition au détriment de la morale. Il leur oppose la religion vraie, que cet ouvrage définit. Nous n'avons pas de devoirs envers Dieu, seulement à l'égard de nous-mêmes et des autres hommes, et les textes sacrés ne valent que parce qu'ils nous rendent attentifs à notre devoir.Le catéchisme moral doit subordonner entièrement la religion à la raison pratique pure. Constatant que le mal est radical, Kant envisage la religion comme ce qui permet à l'humanité de progresser en la dotant d'une représentation sensible du bien. Cette dernière rend possible l'espérance de la vertu, qui soutient l'individu et l'encourage à s'accomplir en tant qu'être libre.La présente traduction donne à lire avec nuance et exactitude cette pierre angulaire de la réflexion kantienne, où le philosophe, après avoir examiné ce que l'on peut savoir dans la Critique de la raison pure et ce que l'on doit faire dans la Critique de la raison pratique, s'attache à une troisième question : «Que sommes-nous autorisés à espérer ?»
A sa parution en 1989, cinq ans après la mort de Foucault, cette biographie fut internationalement saluée comme un événement. Explorant les archives inédites, Didier Eribon y restituait magistralement les mille visages, connus et inconnus, d'un philosophe dont toute l'oeuvre peut se lire comme une insurrection contre la violence des normes et de la normalité. Captant la singularité d'un homme énigmatique et d'une pensée passionnément critique, il la réinscrivait dans ses différentes époques et dans ses multiples dimensions - philosophique, politique, sexuelle... - pour proposer une vaste fresque de la vie intellectuelle française de la deuxième moitié du XXe siècle. Cette nouvelle édition, entièrement remaniée, est largement augmentée de nombreux éléments concernant les relations - positives ou négatives - de Foucault avec Georges Dumézil, Louis Althusser, Jacques Derrida, Pierre Bourdieu, ou encore Simone de Beauvoir... Elle revient également sur les rapports de Foucault à la sexualité ou aux drogues. Qu'est-ce qu'une existence philosophique? Comment un geste théorique s'ancre-t-il dans l'expérience vécue? Telles sont les questions que cet ouvrage entend à nouveau poser, afin de rendre au geste foucaldien et à son héritage leur radicalité.
Qu'est-ce que l'ironie ? Quelles en sont les formes ? Quels en sont les pièges aussi ? Autant de délicates questions auxquelles l'auteur répond, non sans ironie lui-même, avec l'aide d'une infinité d'exemples qui montrent son immense culture, musicale aussi bien que philosophique.
Sommairement, qu'est-ce que l'ironie, sinon la conscience, mais une bonne conscience joyeuse - ce en quoi elle se distingue de l'hypocrisie ? Pas d'humour sans amour, ni d'ironie sans joie. L'ironie, en somme, sauve ce qui peut être sauvé.
Elle est mortelle aux illusions ; partout elle tisse les toiles d'araignée où se prendront les pédants, les vaniteux et les grotesques. « Ironie, vraie liberté ! », s'écrie Proudhon au fond de sa cellule de Sainte-Pélagie. L'ironie remet tout en question ; par ses interrogations indiscrètes elle ruine toute définition, dérange à tout moment la pontifiante pédanterie prête à s'installer dans une déduction satisfaite. Grâce à l'ironie, la pensée respire plus légèrement quand elle s'est reconnue, dansante et grinçante, dans le miroir de la réflexion.
«C'est [une] double lecture que requièrent les Méditations ; un ensemble de propositions formant système, que chaque lecteur doit parcourir s'il veut en éprouver la vérité ; et un ensemble de modifications formant exercice, que chaque lecteur doit effectuer, par lesquelles chaque lecteur doit être affecté, s'il veut être à son tour le sujet énonçant, pour son propre compte, cette vérité.» (Michel Foucault)